Nous publions ici un article paru dans le dernier numéro de la Revue « Lucha de Clases » de l’État espagnol publié par des militant-e-s marxistes actifs au sein de PODEMOS, Izquierda Unida (IU) et le mouvement syndical.
Suite à la déception générée par le gouvernement de José Luis Zapatero (PSOE), l’abstentionnisme et la désillusion de nombreux votant-e-s de la gauche ont permis au Parti Populaire (PP) de cumuler le plus grand pouvoir institutionnel de son histoire à travers différentes élections. Toutefois, les prochaines élections du 24 mai 2015 se dérouleront après le revers du PP en Andalousie où ils ont perdu 14 points malgré le fait d’être dans l’opposition. La classe ouvrière et les couches populaires lui ont fait payer très cher sa politique brutale d’austérité et d’attaques sociales.
La démagogie stérile du PP
Le PP essaye de réactiver sa veine sociale à l’heure de son déclin à travers des mesures comme la facilitation à l’accès à la subvention agricole par la réduction de « peonadas »1, maintien des soins basiques aux migrant-e-s et baisse d’impôts divers. Cette attitude met en évidence la nervosité autour de la direction nationale du PP qui est pointée du doigt par quelques dirigeants régionaux qui voient leurs intérêts en danger. Indépendamment de ces baisses de dernière minute ou de la timide récupération économique en générale qui se base sur des conditions de travail terribles2, la crise a mis en marche le mouvement politique qui vaincra le PP.
Quelle alternative au PP
Dans ces conditions, le PSOE pourrait perdre une grande partie des voix dans beaucoup de localités en commençant par Valence et Madrid, ce qui montre la volonté d’une solution plus radicale contre l’establishment, qu’on attend surtout de la part de PODEMOS. Pour cela, le secteur le plus conscient de la classe ouvrière focalisera ses efforts dans les candidatures capables de regrouper le plus de voix à la gauche du PSOE comme par exemple la candidature d’unité populaire de Ada Colau (ex-porte-parole de la Plate-forme des personnes affectées par l’hypothèque) à Barcelone qui devrait surmonter le PSOE en termes de voix et qui pourrait faciliter la sortie du gouvernement municipale de Convergència i Unió (CiU).
Quel programme ?
Au moment où les nécessités sociales sont les plus urgentes, les institutions sont le plus liées à la réduction du déficit et à l’augmentation de sa dépendance des aides du gouvernement central. Mais une chose est payer la la dette obtenue avec des petites entreprises en difficulté et une autre très différente est payer la dette avec les banques. Depuis PODEMOS, nous devons défendre un auditoire sous contrôle populaire et un moratoire dans le paiement de la dette aux banques. Mais il y a aussi d’autres mesures indispensables qui doivent faire partie du programme de rupture avec la situation actuelle comme par exemple, l’étatisation au niveau municipale des services publics privatisés dans les dernières années, mettre un terme aux plans d’austérité, défendre un service public de qualité et plus de participation populaire avec des assemblées de voisins ayant pleines compétences sur des affaires touchant leurs quartiers (investissements, infrastructures, nettoyage, culture et loisirs, etc.), Augmentation des impôts pour les banques et les grandes entreprises, étatisation au niveau municipale du sol urbain afin de lutter contre la spéculation ou encore que les mandataires ne gagnent pas plus qu’un salaire médian de travailleur qualifié, c’est-à-dire environ 2000 euros.
Gagner la majorité
Le fait le plus marquant des élections autonomes et municipales pourrait être la défaite du PP dans la plupart des municipalités et régions. Les candidatures d’unité populaire soutenues par PODEMOS peuvent être les forces les plus votées. Nous devons gouverner même sans la majorité absolue. Si le PSOE vote contre nous, il perdra toute autorité devant son électorat et favorisera la droite. En gouvernant avec un programme d’avancées sociales en faveur de l’immense majorité de la population, on se confrontera aux limites budgétaires données par le gouvernement central qui nous menacera avec des interventions si nous désobéissons leurs restrictions aux dépenses publiques. C’est là où une organisation comme PODEMOS peut et doit diriger une lutte inter-communautés des populations et autonomies avec des gouvernements d’unité populaire pour la défense des services publics et contre les coupes d’austérité pour s’affronter à la répression du PP contre les institutions. Une lutte organisée dans ce sens avec des mobilisations de solidarité dans tout le pays, pourrait jouer un rôle important dans la conscientisation politique de millions de personnes qui nous ne suivent pas encore, avec des conseillers et députés qui ne baissent pas la tête devant les puissants et qui préparent la victoire dans tout le pays.
L’attitude de PODEMOS envers les gouvernements de coalition
Là où le PSOE soit le parti le plus voté, il faut fermer la route du pouvoir à la droite. Avec tout de même la condition de ne pas participer à des gouvernements qui appliquent des politiques d’austérité. Dans ce cas, on irait directement dans l’opposition dans la rue contre la politique de coupes de la part de la direction du PSOE. Depuis l’opposition, nous mettrons à votation dans chaque mairie et parlement régional, nos mesures contre les délogements et les coupes, mettant ainsi en évidence le PSOE et des partis démagogues et réactionnaires comme Ciudadanos.
Nous avons beaucoup à faire
Les médias des puissants font l’éloge de Ciudadanos afin de réduire l’avancée de PODEMOS, contre lequel ils mènent une campagne de diffamation. Si nous ne sommes pas encore la force déterminante de la politique espagnole c’est parce que de couches énormes de travailleurs et de jeunes ont encore besoin d’expérience et de compréhension de l’époque de crise structurelle du système capitaliste dans laquelle nous sommes et qui ne donne pas de place à une politique de réformes comme dans le passé, sans attaquer les intérêts fondamentales des grands entrepreneurs et des banquiers. Mais les pactes post-électoraux d’après-mai et suite aux prochaines élections générales de novembre, mettront en évidence la nécessité de collaboration entre le PSOE et le PP pour le maintien du régime de 1978. Les sympathisant-e-s qui tiennent encore au PSOE, en cherchant de manière utopique un passé tranquille et stable qui ne reviendra pas,seront déçu-e-s. Nous avons besoin de temps pour que notre organisation se consolide mais le succès ne pourra être assuré que par l’explication patiente de notre programme de rupture avec le désastre capitaliste et mettre les bases sociales en participant à la lutte pour la défense des conquêtes sociales dans les institutions et dans la rue.
1 Le nombre de journées faites par les journaliers afin de pouvoir profiter des subventions agricoles est réduite de 35 à 20 – http://www.laopiniondemalaga.es/andalucia/2015/02/27/gobierno-reduce-35-20-peonadas/747029.html
2Comme celles qui ont provoqué la grève de 40’000 installateurs de fibres téléphoniques de Telefonica récemment contre des salaires précaires et des longues journées de travail
Europe — de Emanuel Tomaselli, ICR Autriche — 16. 11. 2024
Amérique du nord — de la rédaction — 13. 11. 2024
Europe — de Jack Halinski-Fitzpatrick, marxist.com — 11. 11. 2024