Nous avons une longue tradition de lutte pour l’égalité des femmes. Beaucoup de choses ont été accomplies. Néanmoins, les femmes ne sont toujours pas à l’abri de la discrimination et de la violence. Il y a également eu peu de changements dans les conditions matérielles vécues par les femmes, celles-ci continuant d’être moins bien payées tout en continuant à faire la plupart des tâches ménagères et de soins non rémunérés.
Des salaires inégaux pour un travail égal
Parmi les questions des femmes actuelles, l’inégalité salariale constitue probablement la plus importante. Selon les derniers chiffres, cette inégalité s’élève à 18,4% et couvre tous les secteurs. D’une part, la rémunération plus faible des femmes découle directement du modèle bourgeois et de la division bourgeoise du travail, dans laquelle l’homme est le « principal soutien de famille », et a encore renforcé ce modèle. D’autre part, depuis le début du capitalisme, les femmes ont toujours été utilisées pour comprimer les salaires et comme une armée de réserve économique, qui peut être activée et intégrée au marché du travail selon les besoins.
Double charge : famille et travail
On devrait supposer que le progrès technique des dernières décennies aurait permis de réduire les heures de travail et donc d’augmenter le temps libre. Loin de là! Le contraire s’est produit : entre 1997 et 2013, il y a une augmentation de la charge de travail totale pour tous les pères et toutes les mères dans les ménages de couples. Selon l’Office fédéral de la statistique (OFS), les mères continuent à effectuer la majorité des tâches domestiques et de garde d’enfants, soit au total environ 55,5 heures par semaine si le plus petit enfant a moins de 6 ans. Cela seul correspond à plus d’une charge de travail à temps plein. Les hommes effectuent comparativement 30,5 heures de travail domestique et familial.
Les femmes et les hommes dans les ménages avec de jeunes enfants travaillent approximativement la même charge de travail d’environ 70 heures par semaine. Mais puisque les tâches ménagères et la garde des enfants ne sont pas rémunérées, la femme ne reçoit pas de salaire pour la majeure partie de son travail. Le fait que les femmes soient principalement responsables de l’organisation du ménage s’explique par l’inégalité des salaires, qui continue de renforcer les rôles des sexes. L’homme gagne plus et reste donc le principal soutien de famille. Toutefois, dans bien des cas, le salaire de l’homme n’est plus suffisant pour subvenir aux besoins d’une famille et environ 80 % des mères ont un emploi à temps partiel ; en 1992, 50 % d’entre elles occupaient un emploi rémunéré (OFS, 2014).
Mères célibataires (monoparentales)
La situation est encore pire pour les parents seuls. Ils supportent souvent le double fardeau sans aucun soutien. 86% d’entre eux travaillent. Un quart à un tiers d’entre eux, selon l’âge de l’enfant ou des enfants, travaillent de 90 jusqu’à 100 % avec en plus une charge de travail comparable pour s’occuper des enfants et des travaux ménagers (OFS, 2013/14). En même temps, les familles monoparentales, qui représentent 16,5 % de la population, dont 82,5 % sont des mères célibataires, constituent le groupe social le plus touché par la pauvreté parce que l’emploi rémunéré et la garde des enfants dépassent les forces et les capacités d’un individu. 12,7% des parents seuls vivent dans la pauvreté malgré le fait qu’ils poursuivent une activité lucrative (OFS, 2012). Cela renforce encore davantage l’image classique de la famille bourgeoise, d’abord par l’idée qu’une famille monoparentale est incomplète et ensuite par le risque concret de tomber en pauvreté.
Garde d’enfants
60,3% des enfants jusqu’ à 12 ans sont pris en charge hors de la famille (OFS). Ce qui frappe, c’est que 30,5% de ces enfants ne sont pas accompagnés de manière institutionnelle, c’est-à-dire qu’ils ne fréquentent pas de crèches ou de garderies. Il est évident que ces soins ne sont généralement pas fournis par des « nounous » ou des au-pairs, comme suggéré par l’OFS, mais plutôt par les grands-parents dans la plupart des cas.
La double charge ne reste pas sans conséquences
Le stress causé par le double fardeau de la conciliation du travail et de la vie familiale a des conséquences dramatiques. Selon l’ONG «Müttergenesungswerk», la fatigue maternelle, la dépression, l’anxiété, l’insomnie et le burnout ont augmenté d’un tiers depuis 2004!
La violence (sexuelle) à l’égard des femmes continue à avoir lieu dans une mesure alarmante et est une conséquence directe des conditions sociales. Selon une enquête, une femme sur trois est victime de violences physiques ou sexuelles au moins une fois dans sa vie (Killias, Simonin & De Puy 2005). Les relations de domination et d’oppression trouvent ainsi leur entrée dans la relation entre l’homme et la femme sous leur forme la plus cruelle. Cette violence est l’expression de la violence que nous vivons chaque jour dans la dépendance salariale; la pression au travail, le manque d’argent, les problèmes de dépendance, les maladies psychologiques. Tout cela façonne la relation entre les sexes et entraîne un clivage entre eux.
Lutte de femmes = Lutte de classe
Comme indiqué plus haut, ces phénomènes de discrimination à l’égard des femmes ne sont pas la cause, mais l’expression de leur exploitation économique. Pour lutter contre l’oppression des femmes, il ne suffit pas seulement de critiquer ces expressions, mais il est nécessaire de parvenir à une libération économique des femmes, ainsi que des hommes, afin de jeter les bases pour la fin du sexisme et de la violence, qui affectent toujours aussi les hommes.
Nous avons montré plus haut que 8,7 milliards d’heures de travail non rémunérées sont effectuées par an. Ce travail doit enfin être socialisé. Concrètement, cela signifie qu’il faut des crèches gratuites et gérées par l’État pour tous ceux qui veulent les utiliser. En outre, il faut des blanchisseries et de cantines publiques, gratuites, qui peuvent être utilisées selon les besoins. Le progrès technique devrait continuer à être développé de telle sorte que le travail domestique restant soit réduit à un minimum.
« Utopique! » crieront certains. « Nécessaire! », disons-nous. Nécessaire pour libérer la femme et l’homme. Combiné à une économie planifiée sous le contrôle des salariés qui créent la richesse avec laquelle nous transformons la société.
Aline W. et Anna M.
SSP, section enseignement
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