Le 14 juin des milliers de femmes participeront à la grève pour exiger l’égalité entre les genres. Il est important de comprendre l’enjeu autour du travail domestique, la nécessité de sa socialisation pour la libération des femmes et du dépassement du capitalisme pour son application effective.
Alors même que les femmes ont majoritairement intégré le travail salarié (aujourd’hui 70% des femmes en Suisse), le modèle familial typique sous le capitalisme avec la femme comme principale responsable des tâches ménagères reste prépondérant. En effet, selon l’OFS, dans 95% des familles suisses c’est la femme qui s’occupe principalement du travail ménager. Ce modèle impose aux femmes la double charge du travail salarié et du travail domestique, qui forme la base de l’oppression de la femme sous le capitalisme et qui explique les inégalités salariales et autres discriminations sur le marché du travail. Mais ce modèle est nécessaire pour le capitalisme : c’est ce qui permet de nourrir, vêtir, éduquer et soigner les familles de manière gratuite pour les capitalistes (l’OFS estime l’évaluation monétaire du travail domestique non rémunérée à plus de 400 millions de francs CHF).
Donc nous, marxistes, revendiquons entre autres la socialisation du travail domestique pour libérer les femmes des cuisines et chambres à coucher. Cependant, les limites du système rendent cette tâche impossible dans le capitalisme. Cela est évident quand nous analysons les parties du travail domestique qui sont sorties de la sphère privée sous le capitalisme : d’un côté par la marchandisation partielle de ses branches profitables et d’un autre côté par la prise en charge de certains domaines par le secteur public.
Une partie importante des tâches domestiques desquelles du profit peut être tiré sont marchandisés : c’est à dire qu’elles sont intégrées dans la sphère de production capitaliste. On le voit bien avec la production massive de barquettes alimentaires ou dans la restauration rapide. Alors que la tâche de nourrir les familles se fait principalement au sein des foyers, dès que le capitalisme voit une opportunité d’en tirer des profits (l’industrie des fast foods génère un chiffre d’affaire de plus de $570 milliards aux Etats-Unis) elle n’hésite pas à s’en charger.
Cette marchandisation sous le capitalisme n’est pas possible sans des répercussions violentes du fait qu’elle est centrée sur la maximisation des profits et non sur le bien-être des humains et de la planète. Aux États-Unis, près de 40% de la population souffre d’obésité, car la nourriture disponible est de la plus basse qualité possible pour maximiser les profits des grosses industries.
Plus important encore, cette marchandisation ne libérera jamais la femme des tâches ménagères car le capitalisme ne peut pas socialiser ce qui n’est pas profitable. Le travail de garde d’enfants ou des soins exemplifie cela de manière frappante : l’augmentation de la productivité de ces domaines étant extrêmement difficile, il devient très coûteux pour les capitalistes de maintenir ces services (en Suisse une place en crèche coûte plus de 3000 CHF). Mais les salaires n’étant pas assez élevés pour assumer ces coûts, il n’est que possible de les maintenir avec des subventions de l’État.
Ce n’est qu’à travers des luttes ouvrières pendant des périodes de croissance économique que certains projets publics ont pu être mis en place, en particulier l’éducation et les soins qui sont maintenant majoritairement pris en charge par le secteur public. Mais ce sont ensuite ces domaines qui sont les premières victimes des mesures d’austérité en période de crise. De plus, le capitalisme n’est pas capable de généraliser ces projets au bénéfice des masses. Les subventions pour les crèches restent massivement insuffisantes – la Suisse est le pays de l’OCDE avec le financement public des crèches le plus bas : il ne couvre que 6 à 8% des enfants. Quand nous parlons de socialisation du travail domestique, nous parlons de crèches et cantines gratuites dans tous les quartiers et entreprises, de buanderies publiques, de services de nettoyage, de retraite populaire et d’assurance maladie nationale. La raison pour laquelle le capitalisme ne pourra jamais mettre tout cela en place devient donc évidente : le capitalisme est un système qui se repose sur la maximisation des profits, toute dépense n’allant pas directement dans le sens des intérêts capitalistes est donc hors de question.
La socialisation du travail domestique n’étant pas possible sous le capitalisme, sa lutte signifie obligatoirement une lutte pour une rupture totale avec le capitalisme, et la mise en place d’une planification socialiste sous contrôle ouvrier!
Jimena Villar
JS Genève
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