Au mois de mars, le personnel des Urgences Pédiatriques s’est mis en lutte contre la direction des HUG. Dans le domaine de la Santé, où des «services minimaux légaux» interdisent de cesser complètement les activités, les soignants ont trouvé comment faire la grève.
Depuis deux ans le Service d’Accueil des Urgences Pédiatriques (SAUP) est officiellement en sous-effectif de professionnels spécialisés en pédiatrie et urgence, une double qualification très particulière. La réalité est rendue évidente par l’épuisement généralisé de l’équipe de 39 employés fixes qui ne peuvent pas fournir les soins nécessaires aux plus de 27 000 jeunes patients qui arrivent au SAUP par an – chiffre qui monte chaque année sans une vraie augmentation du personnel fixe. L’équipe, dépassée par la charge de travail, ne peut pas bien traiter les patients avec la sensibilité que requiert ce métier. C’est pourquoi ils exigent la création de 20 nouveaux postes fixes.
Au problème du sous-effectif s’ajoute le taux élevé d’absences, que ce soit par maladie ou par burnout, résultat du surtravail. Les tensions augmentent encore plus avec les parents des patients durants les heures de pic. Avec des temps d’attente allant jusqu’à six heures, des conflits émergent, qui mènent à la violence verbale ou même des menaces physiques.
À partir de ces conditions, une partie de l’équipe de soignants à commencé à se manifester pour rendre publiques leurs conditions de travail. Ça fait des années qu’ils organisent des campagnes de lettres à la direction pour négocier l’ouverture de nouveaux postes fixes sans que la situation ne change. Même avec le rapport d’un audit interne en 2017 qui a révélé le nombre de professionnels requis pour fournir les soins de façon correcte, la direction des HUG a refusé d’agir. Un petit changement est arrivé cet hiver avec la mise en place de 4 postes intérimaires, CDD pour quatre mois: une mesure provisoire – qui ne résout rien.
Actions de luttes contre les menaces
Le 14 février, jour du premier rassemblement, les travailleurs ont à nouveau demandé d’ouvrir des négociations avec la direction, en vain. Pendant deux semaines, avec l’assistance du syndicat SSP, ils ont intensifié leurs appels à la direction avant de prendre des mesures plus contraignantes. Soumis à la loi du service minimum, l’équipe ne peut pas juste fermer leurs portes. Les tactiques de grève doivent être modifiées pour toucher exclusivement aux finances de l’institution sans sacrifier la santé des patients. Donc finalement, le premier mars, lors d’une assemblée générale au sein de l’équipe du SAUP, des mesures de lutte ont été adoptées: cesser la facturation des soins infirmiers et des médicaments, cesser tout acte qui n’est pas en lien direct avec les soins aux enfants et cesser d’offrir aux HUG des heures travaillées non-comptabilisées. Ceci afin de mettre en évidence tout le surtravail gratuit qui est régulièrement fait et qui n’est pas en lien avec les soins médicaux directement pourvus aux patients.
Durant la période de lutte, il y’a eu de fortes menaces de représailles envers les employés et particulièrement leurs déléguées, visant à semer la division dans l’équipe et à la séparer des secrétaires syndicaux. Pourtant le mouvement a réussi à maintenir l’unité pour que ces mesures qui touchent directement aux finances des HUG fassent leurs effets. Par moments, les attaques ont déstabilisé l’organisation et l’unité de l’équipe, particulièrement avec les menaces aux déléguées.
La cinquième journée de grève de facturation, la direction a été forcée d’annoncer la création de 10 nouveaux postes au SAUP. Cette promesse – bien que vague et non-contraignante – est une victoire d’étape, et loin de la fin de cette bataille.
Continuer la lutte dans tout le secteur public!
Ce n’est pas que le SAUP qui est en sous-effectif. Dans la majorité des services aux HUG et autres institutions publiques, le manque de personnel est généralisé. Tant que les luttes se développent individuellement, il n’y aura pas de véritables améliorations des conditions de travail et de vie. A travers cet exemple, on observe l’efficacité du personnel d’adapter leur pratique de lutte pour qu’elle serve de contre-attaque efficace sans enfreindre l’abolition de fait de leur droit de grève et sans sacrifier les soins urgents portés aux malades. Elle correspond à leur situation particulière dans un secteur soumis au service minimum légale et montre l’exemple pour d’autres secteurs dans le même contexte.
Entre temps, l’équipe du SAUP continue à rester vigilante pour que les dix nouveaux postes soient remplis d’ici le 10 mai avec des contrats fixes. Les soignants se méfient que la direction ne tienne pas ses promesses et sont sur leur garde contre de possible futures représailles. La situation reste tendue mais la possibilité de reprendre des mesures de luttes plus radicales est toujours présente.
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