Le comité directeur de la jeunesse socialiste suisse (JSS) essaye de contourner le débat sur un programme d’action. Certes, leur projet va dans la bonne direction, mais ne montre pas la profondeur politique nécessaire pour bien préparer les luttes à mener au cours des prochaines années pour aller dans le sens du dépassement du capitalisme. Nous appelons nos camarades à soutenir notre appel pour un débat politique sur le programme d’action.
Le comité directeur propose de traiter comme prochain projet politique, l’enjeu des mesures d’austérité. Dans ce but, ils ont publié un papier de position appelé le « Bürgerliche Sparideologie verhindern ». Ce papier devrait être discuté à la prochaine assemblée annuelle (AA). Le comité directeur y serait mandaté pour élaborer un « manuel avec des propositions de formation politique et d’actions ». Le papier appelle toutes les sections de la JS à la résistance active contre les mesures d’austérité. Avant d’être discuté à l’AA, ce papier devrait être discuté dans les sections et une version retravaillée serait élaborée.
Le courant marxiste de la JS salue la décision du comité directeur de faire du combat contre les mesures d’austérité, un enjeu politique principal. Dans le papier de position, les coupes budgétaires sont mises dans le contexte de la crise et le capitalisme est définit comme la cause principale. Cette analyse est correcte. Mais ce qui suit à cela n’est qu’un catalogue de revendications confuses. Partir du constat que c’est pour sauver la démocratie bourgeoise que l’on augmente les impôts, voici l’erreur. Ce constat est en contradiction avec une perspective de dépassement du capitalisme comme un pas nécessaire pour la résolution des crises. Or, une telle position ne peut en aucun remplacer un débat au sein du parti où les mesures d’austérité sont misent dans un cadre plus large qui nous permettrait de formuler des revendications qui vont au-delà d’une simple augmentation d’impôts. Pour ces raisons, la JS a besoin d’un programme d’action.
La crise du capitalisme dévoile l’impasse profonde dans laquelle se trouve le système. Il est tout simplement incapable de se maintenir stable mais aussi d’améliorer les conditions de la majorité. La source de ce problème se situe dans le fait que la quantité énorme de capitaux amassés n’est pas réinvesti dans l’économie réelle. Les taux d’investissement le montrent très clairement. La conséquence est donc un arrêt du développement économique et un déplacement des capitaux dans des opérations financières spéculatives, responsables du développement des bulles spéculatives. Selon Paul Krugman, économiste et lauréat du prix Nobel d’économie, des décennies de stagnation et de récession sont devant nous. Ce fait qui doit être clair pour nous tous, doit figurer comme le point de départ dans l’élaboration de notre perspective. C’est-à-dire que nous ne nous affronterons pas uniquement à des mesures d’austérité, mais que nous sommes devant une situation de départ qui est totalement différente à la précédente. Nous nous retrouvons au début d’une époque d’instabilité politique, de radicalisation de larges couches de la population et la montée massive d’explosions sociales. Et comme le comité directeur le souligne parfaitement : La Suisse n’est pas une exception.
Un élément central de la crise est le durcissement de la concurrence internationale. L’objectif principal des différents élites économiques nationales est d’augmenter la compétitivité à tout prix. Les conséquences sont des réductions salariales, des coupes budgétaires, guerres de dévises…etc. Les réductions d’impôts et la concurrence fiscale sont un élément clé dans cette optique et se font parallèlement dans presque tous les pays.
Ce n’est pas une question idéologique au premier plan, mais une nécessité du mode de production capitaliste d’assurer les profits. Dans une situation de concurrence accrue, une revendication isolée tel une augmentation d’impôts n’est pas réalisable. La menace des bourgeois de s’en aller avec leurs capitaux n’est pas une simple déclaration. Si on soumettait les riches et les entreprises suisses à un impôt plus haut, ceci aurait des conséquences drastiques pour la Suisse. A cause de la fuite des capitaux, l’économie coulerait. La demande d’augmentations d’impôts va uniquement être prise au sérieux si elle est liée à des propositions d’étatisation et de contrôles de la sortie du capital.
Si nous voulons sérieusement dépasser le capitalisme, nous devons ériger un filet de revendications qui confrontent la logique du capital privé avec la logique du capital socialisé. La demande d’augmentations d’impôts est un élément important mais qui prend encore plus d’importance lorsqu’il est lié à d’autres revendications qui vont plus loin. La demande d’impositions des riches et des entreprises peut être un moyen de mobilisation des gens dans la lutte contre les mesures d’austérité. Mais elle n’est en aucun cas, un remède au problème fondamental.
Si nous donnons l’illusion que l’augmentation d’impôts est une possibilité réaliste et modérée pour atténuer les résultats de la crise, nous allons être confronté à la réalité de la force coercitive du capitalisme et nous créerons que des grandes déceptions dans nos rangs. Il nous faut donc une discussion politique plus large qui formera la base dans laquelle nous élaborerons nos projets. Le résultat de cette discussion doit être un programme d’action qui nous permettra de suivre une stratégie à long terme. Nous n’arriverons jamais au socialisme uniquement en enchaînant des revendications isolées. Nous devons avant tout définir : où nous sommes, où nous voulons aller et avec quelle stratégie nous voulons avancer. Il faut décerner les questions principales de notre temps. La lutte contre les mesures d’austérités forme certainement une réponse centrale.
Les salariés suisses ressentent eux aussi les conséquences de notre époque, fortement marquée par la crise : le niveau de vie baisse, les taxes montent et les loyers également. Les licenciements de masse, la pression croissante au travail et la péjoration des conditions d’embauche sont des conséquences de cette crise. Les jeunes en souffrent particulièrement. Ils se voient privés de leurs loisirs, d’espaces de discussion libres mais surtout d’un futur. Le papier de position du comité directeur ne répond à aucun de ces enjeux. Il se limite uniquement à la problématique des mesures d’austérité. Les jeunes socialistes ont l’obligation d’être présents dans toutes les luttes sociales, que ce soit au sein des mouvements pour des espaces alternatifs, les manifestations contre les coupes budgétaires, des grèves et des luttes dans le travail. Nous devons les relier entre elles avec la logique socialiste que nous défendons.
Pour ces raisons nous demandons de mener un débat pour un programme d’action à l’assemblée annuelle (AA) qui pose les bases pour un projet qui va plus loin. La proposition du comité directeur ne remplace de loin pas la discussion fraternelle autour de ces bases. Nous proposons donc de discuter à l’assemblée annuelle sur d’éventuels projets à mener après l’adoption d’un programme d’action pour les prochaines années. C’est seulement ainsi que nos projets pourront êtres érigés sur des bases solides et nous rapprochera de notre but final : le dépassement du capitalisme.
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