Après seulement un jour et demi de grève, les travailleurs des Transports publics Genevois (TPG) ont obtenu le double de ce que les négociations amicales avec le patronat avaient proposé.
Malgré les attaques de la droite et de la direction des TPG, qui essayaient de disqualifier la grève en présentant les grévistes comme « minoritaires », voir des “frontaliers pourris-gâtés », les travailleurs des TPG ont tenu bon jusqu’à faire plier la direction. Alors que celle-ci proposait initialement 0.6 d’indexation des salaires avec une prime ridicule de 400 francs en plus, les grévistes, par la mobilisation, ont pu leur forcer d’accepter une indexation à 1.2%.
Retour sur deux jours de grève
Après la publication du préavis, la grève effective, portée par les syndicats SEV et Transfair, a commencé le mercredi 12 octobre, à 3h30 lorsque les conducteurs ont installé des piquets de grève devant les trois grands dépôts TPG, afin d’empêcher la direction de faire sortir les bus et, ainsi, casser l’impact du mouvement. Cette première mobilisation massive, avec 70% des travailleurs en grève, à laquelle des militants de l’étincelle ont participé en soutien, a permis de contrer la tactique de pression de la direction, qui visait à forcer certains conducteurs à prendre le volant et casser la grève. Finalement, seulement une cinquantaine de bus est sortie du dépôt.
Les piquets de grève se sont ensuite poursuivis toute la journée, avec des discussions passionnantes sur la situation du travail aux TPG et plus largement sur la crise qui touche la classe ouvrière partout dans le monde. Des représentants du syndicat UNIA des maçons, qui, eux, feront grève les 6 et 7 novembre, sont venus apporter leur solidarité au mouvement des TPG. Nos militants présents au piquet du dépôt de la Jonction ont ainsi pu demander leur avis aux grévistes sur les revendications portées par le mouvement. Un conducteur de trolleybus nous explique que la question salariale n’est que la pointe de l’iceberg. Il raconte comment la direction, petit à petit, s’attaque aux conditions de travail depuis des années.
Par exemple, depuis maintenant quelques années, l’horaire est réglé à la vingtaine de seconde et l’horaire calqué sur les données gps des bus. Le résultat : des horaires irréalistes et des temps de pause qui disparaissent. Un autre explique comment cette politique d’économie crée un cercle vicieux : avec les cadences qui augmentent, l’absentéisme grandit et les travailleurs encore présents sont forcés à compenser les heures, ce qui augmente encore le surmenage. Finalement, c’est la sécurité des conducteurs et des usagers qui paye. Il conclut: « On est sur une pente descendante lente depuis des années, ça ne peut plus durer”. Et le soir, face à une direction toujours inflexible, la décision correcte est prise : la grève continue pour un deuxième jour. Enthousiaste, une contrôleuse nous dit “Si on continue demain, moi je serais là !”
La Fonction publique entre en scène
Durant l’après-midi, alors que les piquets se maintiennent devant les dépôts, c’est au tour de la fonction publique cantonale d’entrer en grève, avec des revendications de lutte contre l’inflation similaires à celles des TPG (5% d’indexation des salaires), ainsi que le maintien des nouveaux engagements prévus et le retrait d’un projet de loi facilitant les licenciements. Lors de l’assemblée générale, des travailleurs et travailleuses des différents secteurs (social, santé, éducation, etc.) ont apporté des nouvelles de la mobilisation sur les différents lieux de travail.
L’étincelle était aussi présente avec comme message : il est impossible de négocier, seule la grève fera plier le gouvernement. De plus, nos militants ont appuyé l’importance des revendications, non pas pour la négociation avec le Conseil d’Etat, mais pour étendre la lutte à plus de collègues et de secteurs, afin de construire un rapport de force et imposer ces revendications.
Malheureusement, la mobilisation n’a pas pu être aussi bonne qu’au TPG et la suite du mouvement reste floue, alors que le Conseil d’Etat n’a pas voulu entrer en matière sur un retrait des attaques. Une suite claire du mouvement doit être déterminée : avec une nouvelle assemblée, un programme de revendications plus larges et une stratégie pour le faire appliquer. Il est clair que les conditions de travail dans la fonction publique s’aggravent, comme aux TPG. A l’Hôpital cantonal, par exemple, les infirmières ne font pas grève car leur effectif est tellement réduit qu’il ne remplit même pas les conditions d’un service minimum. Ainsi, pour la fonction publique, nous ne sommes qu’au début d’une mobilisation plus large, qui sera nécessaire pour défaire les attaques actuelles et celles qui viendront dans le futur.
Une victoire à long terme ?
Cependant, malgré cette victoire des travailleurs des TPG sur l’augmentation des salaires, la lutte n’est pas terminée. L’indexation gagnée ne suffit pas encore à couvrir l’inflation qui augmente en Suisse et au niveau mondial, et, comme nous le disaient les travailleurs sur les piquets, le fond du problème, aux TPG et ailleurs, n’est pas la question salariale mais celle des conditions de travail et des moyens. Des engagements massifs sont nécessaires pour remplir (et développer) l’offre en transports publics et la direction n’a comme seule tâche que tirer un maximum de chaque travailleur, même si leur sécurité et celle des usagers est réduite. Les travailleurs en sont bien conscients : la lutte des deux derniers jours ne suffira pas à régler les problèmes en profondeur.
D’autres mobilisations seront nécessaires et la victoire partielle de cette grève doit être utilisée par les syndicats pour poursuivre la construction du rapport de force et revendiquer de véritables avancées. La victoire d’aujourd’hui affirme une chose : la négociation n’apporte rien, seule la grève paie et elle est l’instrument le plus puissant que la classe ouvrière a à sa disposition pour se battre contre les attaques du patronat !
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